Et si les Beatles avaient joué dans le Seigneur des anneaux ? 

Le cinéma et la musique tiennent une relation à part dans l’art. Les liaisons parfois dangereuses donnent à voir et à entendre l'improbable autant que l’inimaginable. Dans cette histoire, aussi vieille que l’Homme, on trouve des anecdotes comme celle titrée plus haut : les Beatles qui auraient dû jouer dans l’adaptation du Seigneur des anneaux. Petit point musico-cinématographique, plein de flower power et d’aventures pied nu. 

 

Le chant des Hobbits

Les quatre garçons dans le vent ont en 1968 déjà joués dans plusieurs films : A Hard Day’s Night,  How I Won the War, Magical Mystery Tour et The Magic Christian. Ils affirment alors leur amour pour le mariage entre les deux formes d’expressions complémentaires que constituent les sons et les images. Derrière ces films se trouve Denis O’Dell, directeur d’Apple Films, une branche d’Apple Corps davantage orientée vers le 7ᵉ art. Sans doute fan de grandes épopées dans des mondes fantasmagoriques, notre Denis s’oriente vers la lecture de Tolkien.  

Subjugué et décidément convaincu que le Seigneur des anneaux pourrait constituer une saga épique de film, il envoie à ses amis de toujours les livres en expliquant ses intentions. Le groupe est convaincu, et plus encore puisque John Lennon lui-même a pour livre de chevet la dites séries. En effet, le mouvement hippie s’approprie l’univers romanesque comme un représentant concret de leurs idées. La vie en accord avec le monde, où chacun a sa place et où le quotidien n’est pas tant un peace and love qu’un art d’être. 

Tout ça conduira à plusieurs faits plus étonnants les uns que les autres. Voici les trois informations qui ont capté toute mon attention : la première est que John Lennon a tenté farouchement de convaincre ses camarades de racheter les droits d’auteurs de la série littéraire. Pour, à la fois, avoir la main mise sur le projet, mais aussi, pouvoir être libre de leur mouvement. La deuxième, c'est la répartition des rôles : Paul devait jouer Frodon, George aurait joué Gandalf, Ringo dans le rôle de Sam et…John serait Gollum ! Imaginez une seconde l’eugénisme décadent qu’aurait été la fusion de ceux deux êtres :

Mais la plus intéressante, parce que la plus folle, est bien la dernière. L’adaptation de l’odyssée de Tolkien devaient être une comédie musicale ! En effet, le groupe voulait réaliser les compositions originales dans la lignée de leurs précédentes expériences, donc le résultat ressemblerait davantage à un « film musical », puisque celle-ci aurait eu une place centrale dans la réalisation. Enfin, à la concrétisation de ce projet, nos quatre copains avaient décidé que la mise en image serait faite par, ni plus, ni moins, que Stanley Kubirck… 

Mais alors, que s'est-il passé ? 

Ce qu’il s’est passé, c’est qu’il ne faut pas rêver ! Vous ne pouvez pas vous emparer d’une œuvre et en faire n’importe quoi sans vous prendre des portes. Tolkien a refusé catégoriquement, et sans négociations possibles, de vendre ses droits à un groupe de musique, et encore moins aux Beatles, leurs idées et leur image de gentils garçons à sa Reine. Quant à Stanley Kubrick, il a tout simplement dit que les romains étaient inadaptables. 

Après ça, le réalisateur de 2001 l’Odyssée de l’espace, ira explorer les méandres les plus violents de la nature humaine avec Orange Mécanique. Tolkien donnera les droits pour le film d’animation de Ralph Bakshi qui reprendra la première moitié de l’œuvre ; il n’y aura pas de suite avec les films de Peter Jackson qu’on connait aujourd’hui. Enfin, nos amis à la coupe bol avaient un contrat à respecter chez United Artists, pour le film documentaire : Let it be. Ils respecteront leurs engagements.  

La boucle sera bouclée dans ce grand sac de nœuds, puisque Peter Jackson prendra les rushes de Let it be pour réaliser son documentaire Get Back chez Disney. Mais là où le hasard est un petit malin, c’est que : United Artists avait brandi l’étendard au projet des garçons dans le vent, en rappelant qu’ils s’étaient déjà engagés ailleurs. Et en 1978, Tolkien vend enfin ses droits pour l’adaptation animée à ni plus ni moins que…United Artists !

Si l’histoire nous a s’en doute préservé d’un traumatisme général de voir John Lennon en Gollum ; il n’en demeure pas moins que sur le papier le projet est plus qu’intéressant. Car mélanger les univers de Tolkien, des Beatles et de Kubrick, c’est un régal visuel, auditif et romanesque qui aurait pu être sans précédent ! Mais c’est sur ce type de légendes de film jamais réalisés que l’être humain peut en fin de compte le plus voyager. Car, ce qui est merveilleux avec les rêves qui ne se réalisent pas, c’est qu’ils vivent encore. Et dans une société où l’on court à les effacer en les concrétisant à tout prix, peut-être serait-il bon de s’efforcer d'en créer davantage ? Car si le rêve n’est pas le propre de l’être humain, il est cependant le seul chez qui il peut faire battre le cœur à l’unisson !