Climbing Up The Walls de Radiohead ou la fascination de Thom Yorke pour la folie humaine
Sorti en 1997 sur l’album légendaire O.K Computer, le morceau Climbing Up The Walls — littéralement, « grimpant aux murs » (dans une acception de la folie) — dissimule une histoire de création étonnante.
Les fans de Radiohead ne sont pas sans connaître l’engagement de Thom Yorke dans l’écriture et le style des paroles et de la musique de ses chansons, ainsi qu’une certaine revendication politique qui parcourt de manière patente l’ensemble de l’œuvre du groupe et notamment ce troisième opus.
Cependant, mon attention a particulièrement été attirée sur le titre arrivant à la neuvième place, Climbing Up The Walls, expression qui signifie être stressé, angoissé, agité, au point de grimper aux murs. En effet, à la lecture du texte, je me suis interrogée sur ce qui avait inspiré ces paroles à notre cher Thom. Indubitablement, cette chanson parle de nos peurs profondes enfouies au plus intime de notre être, de nos monstres cachés, de la folie qui nous habite plus ou moins… et par-dessus tout, ce que le mauvais encadrement de la folie peut amener à susciter comme terreur et à commettre comme délits, crimes, passages à l’acte.
Et bien… lorsque le leader du groupe était plus jeune, il a travaillé comme garçon de chambre dans un hôpital psychiatrique en Angleterre ! Cette chanson parle du traumatisme que cela a suscité en lui et de l’ineffable de la folie humaine. En effet, il y a œuvré à l’époque où une nouvelle loi politique rentrait en vigueur en Angleterre : le « Care in the Community ». En résumé, c’est une loi qui permettait aux patients psychiatriques de ne plus être enfermés dans des asiles, mais de bénéficier de soins psychiques tout en restant chez eux.
Or, à cette époque, de graves agressions ont été commises sur des citoyens de la part de patients psychiatriques qui, justement, étaient dès lors en liberté. Et Thom a déclaré dans une interview : « Cette chanson parle de l’indicible. Littéralement, ce qui plombe le moral. J’ai travaillé dans un hôpital psychiatrique au moment où le gouvernement a mis en place le Care in the Community, et nous savions tous ce qui était en train d’arriver. Et c’est l’une des pires choses arrivant dans ce pays, parce que beaucoup d’entre eux n’étaient pas inoffensifs. » Ailleurs, il ajoute que « Certaines personnes ne peuvent dormir avec les rideaux ouverts, au cas où ils verraient les yeux qu’ils imaginent dans leur tête toutes les nuits, scintillant dans le reflet du verre. Beaucoup d’entre eux ont des boutons d’appel d’urgence dans leur chambre, pour qu’ils puissent déclencher l’alarme sans que l’intrus s’en aperçoive. Cette chanson fait allusion au monstre dans le placard. »
En résumé, cette expérience dans un asile psychiatrique et la peur que cela a suscité tant chez Thom que dans la population anglaise des années fin 90 ont permis l’écriture de ce chef-d'œuvre de l’album. Par là même, il dénonçait le manque d’encadrement apporté à toutes ces personnes fragiles psychologiquement. Si la pression se fait sentir, à écouter d’urgence !