L’histoire derrière la séparation d’Oasis
Il ressort de l’industrie musicale, au-delà d’une gigantesque production de singles, d’albums et de clips, un vaste spectacle mêlant toutes les personnalités, de tous les genres, de tous les arts. C’est un vivier à part de celui de la créativité et de l’originalité, une machine à histoires qui, de concert avec la presse, alimente et relaie les grandes tragédies du monde de la musique ; ses mythes (comme le club des 27) et vaudevilles (la relation présumée de Mick Jagger et David Bowie). Puis au cœur de tout ça, quelque part entre le théâtre de l’absurde et la télé-réalité, un show à part dont les contradictions scénaristiques et la vulgarité des dialogues rendent caricatural le titre-même : Oasis.
Colosse de la britpop des années 90, le groupe flirte à son apogée avec un succès digne des Beatles. Et comme eux, ce sont les deux têtes fortes du groupe qui font parler d’elles : Noel et Liam Gallagher. À l’inverse de Lennon et McCartney pourtant, les frères ne partagent pas bien plus qu’un nom, un ex-groupe et, depuis sa séparation il y a bientôt 15 ans, un clash via leurs interviews respectives. Pourtant, si chaque méchanceté balancée provoque l’hilarité générale, la rumeur d’un retour d’Oasis se tient prête à rejaillir, comme une braise attend la brise. Comment expliquer que le rideau n’ait jamais clos cette histoire-là, pourtant consumée depuis longtemps ? C’est peut-être que, du public, des comédiens ou des critiques, personne ne semble avoir bien saisi le dernier acte.
28 août 2009, festival Rock en Seine, mainstage. Après une vingtaine de minutes d’attente, le public apprend du discours lunaire de l’organisation qu’Oasis ne jouera pas, que Liam et Noel se sont battus, et que le groupe n’est plus. De ces faits, les dizaines de milliers de spectateurs déçus peuvent témoigner. À cela s’ajoute un indice, une arme peut-être ? C’est la guitare de Noel, explosée par l’un ou l’autre, ou chacun, des deux frères. Et puis… rien. Enfin rien d’incontesté et, surtout, rien de nuancé. Les Gallagher assurent leur défense comme ils jouent de la musique : tout à fond. Noel se barre parce que Liam veut faire la pub de sa marque de fringues en concert ? Mensonges, dit Liam : il voulait prendre le contrôle du groupe. Calomnies, répond Noel : Liam est ingérable, il n’assume pas la gueule de bois et annule ses concerts en conséquence (comme au V festival quelques jours plus tôt). Immondes inepties : c’est une laryngite chronique dont il s’agit. Puis commence la spéculation. « Oasis, la rupture : les raisons de leur séparation ! », s’en mêle Marie Claire : « [Liam] aurait dit à son frère Noel que sa fille n'était pas vraiment la sienne en fait ! ».
Ce n’est pas tant l’opacité des évènements racontés qui interpelle que la quantité d’encre qui en a découlé - comme pour recouvrir plusieurs décennies de conflits fraternels d’une couche supplémentaire d’illisibilité et de ragots. Quinze ans plus tard, les articles et interviews se ressemblent encore, entachant au moins partiellement les carrières solo de deux artistes accomplis. En définitive, il n’y a d’autre histoire derrière la séparation d’Oasis que celle d’une famille et de son œuvre, lésés par un jeu médiatique auquel se sont adonnés les frères Gallagher, et qu’ils ont perdu du simple fait de s’être trompé d’adversaire.
